Le coureur de serpents

Le coureur de serpent, de Christian Viguié – Éditions les Monédières – 2024

Bon, je ne suis pas convaincu. Pourtant, y a de l’idée. Les règles du « noir à la française » sont respectées : méchants fachos très méchants, gentils paumés qui aiment picoler et n’ont plus beaucoup d’illusions. Pas de happy end, ce monde est merdique. On y revient toujours. Un style original, certains diront poétiques. Parfois ça fonctionne avec quelques très belles images. Souvent ça tourne au chichiteux.

C’est pas là que ça déconne. Plutôt que l’intrigue est mal équilibrée. On comprend tout au premier tiers du roman, l’enquête commence au second. L’inverse eut été plus avantageux pour nous tenir en haleine. Nombreux chapitres où il ne se passe pas grand chose, tentation naturaliste (Ils vont faire des courses, ils boivent un café, il fume une clope, elle sort le chien, etc.), mais avec une écriture toute en images et métaphores, ça sonne bizarre. Tous les personnages parlent pareil (dans le même style ampoulé que les passages narratifs), de l’officier en retraite au clodo dans sa cabane, du flic à la demandeuse d’emploi. Bref, ça sent l’artifice. Pour la psychologie, on repassera. Le pompon au fils du gros méchant, lui aussi très méchant, sans état d’âme comme papa. Les gênes sans doute.

Pourtant, il y avait matière. Un bouquin sur les commandos Delta (bras armé de l’O.A.S.) : oui ! Un pan de l’Histoire française dont on aime pas trop se rappeler. C’est bien comme sujet. Raconter comment ces salopards se sont recyclés après la guerre d’Algérie, comment ils ont continué à œuvrer plus ou moins jusqu’au début des années 80 (l’attentat de Toulon est évoqué dans le roman), comment ils ont été amnistiés sous Mitterrand, c’est encore mieux. Mais cette matière est assez vite expédiée pour consacrer beaucoup de temps aux protagonistes principaux qui ne nous intéressent pourtant que bien peu. Jamais on ne tremble pour eux, l’attirance entre Marc et Hélène ne nous émeut pas plus que ça, quand Georges finit à l’hôpital on s’en fout (la narration de l’agression est expédiée, il s’en sort avec quelques côtes cassées). Ils ne font preuve d’aucune pugnacité, d’aucune astuce, d’aucun courage. Tout se dénoue en un chapitre autour d’un ordinateur qui, joie d’internet, permet de tout éclaircir d’un clic de souris magique.

Bref, je ne suis pas convaincu.

Le coureur de serpents par Christian Viguié

Le coureur de serpents

Le coureur de serpents

Christian Viguié

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Pégase, le cheval volant, de Hélène Kirillis

Petit roman, indiqué première lecture, pour les enfants dès 7 ans. L’histoire de Bellérophon, mais avec Pégase comme personnage principal (plus merveilleux, plus gentil, plus mignon pour les jeunes lecteurs que le héros grec à l’hybris démesuré).

Le livre a toute les qualités requises : c’est beau, c’est pas cher, c’est bien et abondamment illustré. Présentation des personnages sur la jaquette (à rabat s’il vous plaît), quizz et petit topo pour « aller plus loin » en fin d’ouvrage. Et, en super-bonus, un QR code pour entendre l’auteur te lire l’histoire.

Bref, un livre de maintenant, bien fait. Comme il y en a beaucoup (trop diront certains (j’en suis)). Un exemple parmi des milliers de la surproduction éditoriale actuelle. Pas plus mauvais et pas meilleur qu’un autre. Je n’attaque personne : les éditeurs doivent occuper du rayonnage dans les supermarchés culturels, les auteurs et les illustrateurs doivent crouter (là aussi, j’en suis). On propose des ouvrages de plus en plus standardisés pour éviter toute surprise, surtout pas de fantaisie ou de pas de côté. Voilà.

Le récit nous raconte jusqu’à la fin tragique de Bellérophon, ce qui est assez courageux. D’autres se seraient contenté de ses succès contre la chimère pour ne pas entacher son image héroïque. Un bon point !

Je trouve le vocabulaire et les tournures de phrases un peu complexes pour une première lecture. La majorité des élèves de CE1 auront du mal à s’y retrouver d’après moi. Attendre le CE2 pour l’offrir à votre cher tête blonde !

Ma première Mythologie : Pégase, le cheval volant par Hélène Kérillis

Ma première Mythologie : Pégase, le cheval volant

Ma première Mythologie : Pégase, le cheval volant

Hélène Kérillis

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Musique française, de Mérédith le Dez

L’idée est amusante : le président de la République disparaît en forêt le soir de sa réélection et nous le suivons, lui et ses proches, pour voir ce que provoque en eux cet incident inattendu : son chauffeur, sa femme, son ami d’enfance, sa directrice de campagne et ainsi de suite.

Pourquoi pas. Le ton est léger, c’est bien écrit. Ça se veut mordant, mais on utilise l’imparfait du subjonctif fort à -propos (et sans que ça fasse ridicule, bravo). Le parallèle entre la musique française, celle du début du XXème siècle, Debussy et Ravel en tête, faisant échos à la petite musique politicienne qui nous est si familière. Là aussi, pourquoi pas.

Pourtant, le compte n’y est pas. J’aime qu’on me raconte une histoire, et ici il n’y en a pas. Une succession de portraits, plus ou moins bien tournés, oui. Mais guère plus. La charge critique est bien convenue, certains personnages flirtent avec le cliché, tout ça manque de relief et de cruauté. Si le pessimiste constat que notre système politique est à bout de souffle est réhaussé par un message optimiste : la musique sauve, la musique rend les gens meilleur, la musique fait advenir le meilleur en eux, cela ne suffit pas vraiment à convaincre. Pourtant, je partage le point de vue absolument : seul compte le chant. Le reste n’est qu’accessoire, comme la course à l’Élysée.

J’aurai préféré autre chose. Sur le même thème : l’examen de conscience d’un homme puissant lors d’un incident de santé, et avec la même conclusion – une fois l’introspection terminée, le naturel revient au galop –, on lira plus avantageusement le chef-d’œuvre de Simenon, les Anneaux de Bicêtre.

Merci à Masse Critique pour cette lecture.

Musique Française : Fantaisie pour la pluie par Mérédith Le Dez

Musique Française : Fantaisie pour la pluie

Musique Française : Fantaisie pour la pluie

Mérédith Le Dez

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Lu et approuvé : les secrets de l’air qui nous entoure

Les secrets de l’air qui nous entoure et comment il a changé le cours de l’Histoire, de Sam Kean, chez Quanto, 12€25

Un titre à rallonge pour un type de livre que je ne lis jamais ! Ça partait bien. 

Vous connaissez Masse Critique ? Ce qu’il y a de bien, avec cette opération, c’est qu’on tente des lectures qu’on ne s’autoriserait pas habituellement. Ici, un ouvrage de vulgarisation scientifique. Je suis plutôt porté sur les romans, à la rigueur les livres documentaires sur la littérature ou l’art, mais alors la science !

Et pourtant, ce petit livre est très chouette. Vraiment ! San Kean possède un talent certain pour raconter des histoires et il profite de son sujet pour nous en conter une quinzaine qui ont la bonne idée d’être tout aussi palpitantes qu’édifiantes d’un point de vue scientifique. 

On y croise des prix Nobel, des scientifiques de renom, mais aussi un pétomane et un vieux grignou qui refuse d’évacuer sa maison alors qu’un volcan va exploser à cinq kilomètres de chez lui. On y cause de l’air, mais aussi de l’art de faire du froid ou de bidouiller une bombe atomique.  Cet éclectisme dans les sujets abordés (même si on revient régulièrement à la question principale : la composition de l’air et son évolution) conjugué au sens de la narration du bonhomme et on obtient un livre fort réjouissant qui se lit vite (ou par petits morceaux si vous en avez envie). 

Petit bémol : l’édition n’est pas très belle, un poche à la maquette étouffante agrémenté de quelques photos minuscules et mal reproduites, le tout pour 12€25, même avec l’augmentation du papier, c’est un peu cher.

Heureux de cette incursion dans des territoires livresques jusque-là inconnus…

Lu et approuvé !

Lu et approuvé : Même les girafes dansent

De Gil Andreae & Guy Parker-Rees

Gautier-Languereau – 2023 – 10€95

 

Tout le monde s’en fiche, mais j’adore les girafes. Animal préféré, de loin ! J’en ai une presque grandeur nature en peluche qui encombre un coin chez moi et je sors souvent avec mes chaussettes girafe car il n’y a rien de plus élégant. Bref, les girafes, ça me connaît.

Aussi quand Masse Critique a proposé dans sa sélection jeunesse : « Même les girafes dansent », je n’ai pas hésité une seconde ! Merci à eux.

Le plaisir est au rendez-vous, les illustrations de Guy Parker-Rees sont très drôles et enlevées. Mention spéciale aux lions qui dansent le tango et aux singes qui se trémoussent dignement sur un air de cha-cha-cha. Rien que pour ça, l’ouvrage vaut la peine.

Pour l’histoire, je suis moins convaincu. Petite fable sur la confiance en soi, lénifiante et assez gnangnan. On nourrit comme toujours l’injonction, aussi anglo-saxonne que sacrée, de croire en ses rêves. Bon, un peu rebattu et sans originalité dans le traitement, même si c’est une girafe qui joue cette fois le rôle du vilain petit canard !

Lu et approuvé ! Philosophie de la création artistique, par Laurent Guyot.

Alors, suis-je à même de dire quelque chose de pertinent sur ce livre ? C’est la question. N’étant pas étudiant en philosophie, ni amateur livresque du genre philosophique, ni philosophe tout simplement, cela paraît un peu ardu. Je n’ai ni les références, ni les points de comparaison pour dire si dans le corpus, sur le sujet, dans cette veine, celui-ci est meilleur qu’un autre.

Vous connaissez Masse Critique ? On coche plein de cases dans une liste de livres et on vous en envoie un gratos. Il vous suffit en échange de le lire et de le chroniquer, ce que je m’applique présentement à faire. Alors dans la liste de bouquins, il y a de tout. On choisit en fonction des titres, des auteurs, des éditeurs. Et ensuite vient la surprise. J’adore !

Pourquoi ai-je coché celui-ci ? Sans doute parce que la création artistique m’intéresse, me passionne même. D’habitude, je m’attache plus aux ouvrages qui abordent l’aspect pratique de la dite création. Pourquoi pas, pour une fois, voir les choses de plus haut ? me suis-je dit.

Et j’ai coché la case.
Et j’ai reçu le livre.
Et je l’ai lu.

Je peux commencer par dire que j’aime beaucoup l’objet en soi. Ce n’est pas une blague, je suis attentif toujours à la maquette, à la typo, au papier, à la couv. Ici, tout est beau et bien fait. Quand j’ai découvert l’ouvrage, je me suis immédiatement dit que ce serait classe d’en avoir une petite dizaine du même type collés les uns aux autres pour se tenir chaud et faire beau sur une étagère. C’est déjà un premier point, du bon boulot.

Pour le reste ? J’ai trouvé très intéressant le chapitre sur « art et création », de loin celui qui m’a le plus captivé. La partie « art et marchandise » offre aussi des réflexions passionnantes. Après, je dois avouer m’être un peu perdu, sans doute par manque de références. le style est pourtant tout à fait limpide, ni ampoulé ni jargonneux.

Simplement, je ne suis pas armé.

Par contre, je perçois tout de même assez de qualités à ce livre pour être certain qu’il conviendra à d’autres qui le sont plus que moi.

Philosophies de la création artistique par Laurent Guyot

Philosophies de la création artistique

Philosophies de la création artistique

Laurent Guyot

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